Gallman, Marika. Maeve Regan, tome 1. Rage de dents

Entre ses cours à l’université et ses amours frivoles, la vie de Maeve était jusque-là assez simple. C’est sans compter sur le mystère qui pèse sur ses origines, qui va lui être révélé à l’occasion d’une tentative d’enlèvement sur sa personne. La jeune femme découvre atterrée que son grand-père lui a caché depuis des années la vérité : ses parents ne sont pas morts dans un accident, et les responsables de cet état de fait son maintenant sur ses traces, alors qu’ils ne la croyaient jusque-là plus de ce monde. Improbable hybride, Maeve va choisir de s’allier avec un vampire aussi dangereux que séduisant, afin d’apprendre auprès de lui comment s’habituer à sa nouvelle vie, et ne pas s’en laisser compter par ceux qui cherchent à la capturer.

Si les Editions du petit caveau ont choisi depuis quelques années maintenant de se focaliser sur le thème du vampire, aucun roman estampillé Bitlit n’avait encore fait son apparition parmi leur catalogue. Certes, leurs ouvrages mettent souvent en scène de jeunes femmes à la forte personnalité, mais le contexte était, jusque-là, essentiellement tourné vers le XIXe siècle et l’époque victorienne. Rage de dents est donc le premier pas de la maison d’édition vers une littérature vampirique à la fois féminine et moderne, à l’instar des ténors US du genre (Patricia Briggs, Kelly Armstrong, Laurell K. Hamilton pour en citer quelques uns). Je ne suis certes pas un grand amateur du style, ayant quelques soucis à voir le vampire se transformer de plus en plus en créature torturée, dotée d’une âme et conscience (Louis de la Pointe du Lac étant une des rares exceptions qui trouve grâce à mes yeux), mais voir enfin (même s’il y a eu quelques essais en la matière) une auteur francophone se pencher sur le genre a su titiller mon attention. Surtout que quelques mois plus tard, la dite auteur a vu sa série reprise sous l’étendard Milady / Bragelonne, qui propose avec ce titre sa première série d’origine francophone, dans une version remaniée par l’auteur.

D’emblée, le gros point fort qui s’impose au lecteur, c’est le style de l’auteur. Fluide, sans temps mort. Quasi aucune faiblesse narrative, pas de longues descriptions qui me poussent souvent (j’avoue) à sauter quelques lignes. Ici, c’est à la fois vif et dynamique, l’utilisation de la ponctuation étant sans fausses notes. Des phrases courtes donc, où aérées comme il se doit. L’aspect fantastique (et donc vampirique) met certes un moment à se profiler, même si on sent rapidement quelques pistes se dessiner. Mais il s’agit de l’introduction du premier opus, et partant de la série. Autant dire qu’une fois celle-ci derrière nous, on peut pleinement savourer le mordant de l’ensemble. Reste que cette mise en scène initiale aurait peut-être pu être un peu plus courte, pour laisser davantage de place au dynamisme de la suite.

En terme d’ambiance, on est pleinement dans une Bitlit qui n’a pas froid aux yeux. Les envies des personnages, leur attirance réciproque ne sont absolument pas gommées ou inhibées, mais pleinement assumées. A tel point que l’héroïne pourrait apparaître, dans les premières page, comme une Marie couche-toi là. Sauf que la suite vient quelque peut modifier ce tableau, en dessinant peut à peu la personnalité de l’héroïne face à son historiques pour le moins houleux. Et face à ce qu’elle est réellement ? Même si je ne suis pas fan de ce type de lecture, je dois avouer que j’ai lu sans temps morts ce premier opus, sans aucun écueil.

Les vampires tels que mis en scène par Marika Gallman sont des créatures essentiellement nocturnes (même si elles peuvent affronter les rayons du soleil), qui ont besoin de boire régulièrement du sang pour survivre. Elles ne craignent réellement qu’un pieu enfoncé en plein coeur, voire la morsure d’une lame d’argent qui s’avère la matière la plus efficace pour les blesser. Ils se reflètent par contre sans souci dans les miroirs. Les vampires semblent enfin en mesure de transformer des humains en buveurs de sang par leur morsure, et disposent d’un pouvoir de suggestion contre lequel seuls les non-morts sont immunisés.

J’ai certes parlé d’une entrée en matière qui aurait pu être plus concentrée, et d’un univers qui reste, pour le moment, assez classique. Reste qu’on en est pas moins en présence d’un premier opus prometteur, qui révèle une auteur à la plume maitrisée, dont le style et la maîtrise de la langue est un des points forts, et offre un dynamisme et une grande lisibilité à ce premier opus de la série. Je lirais la suite avec un grand plaisir.

2 réponses à Gallman, Marika. Maeve Regan, tome 1. Rage de dents

  1. Asmodée dit :

    La bit-lit pur jus était à ce jour un parent pauvre de la littérature francophone. Les éditions du petit caveau s’aventurent avec brio sur ce terrain peu exploité avec Maeve Regan, leur nouvelle série aux dents longues.

    Une première incursion qui fleure bon la réussite, ce pour plusieurs raisons. Première qualité, et non des moindres : le style de l’auteure. Trop souvent négligée dans des œuvres du même acabit, l’éloquence littéraire de Marika Gallman se révèle enthousiasmante. La narration est fluide, très moderne, mais ne se départit pas d’un réel travail sur la forme, à travers une prose construite et agréable. On retrouve également un humour noir parfaitement maîtrisé – corrosif diront certains, ainsi qu’une capacité à donner corps à une héroïne haute en couleur. Celle-ci n’est d’ailleurs guère adepte d’un langage châtié, il faut bien l’avouer.

    En toute franchise, le personnage principal est la grande attraction de Rage de dents. Jeune femme désabusée, il s’ajoute à son tempérament de feu une sensibilité enfouie qui rejaillit au détour de certains passages. Cette combinaison nuance Maeve d’une palette d’émotions très humaines. Il faut percevoir ce 1er tome comme le début d’un parcours initiatique. L’intrigue met quelques chapitres à démarrer. Cependant une fois lancée, l’aventure prend son rythme de croisière dès l’entrée en scène de Lukas, le vampire au charme narquois. Ce rythme posé permet de s’imprégner du quotidien de l’héroïne, des liens qu’elle partage avec son entourage, et ça c’est du tout bon. Orageuse au possible, la relation que va nouer Maeve avec Lukas reste finalement convenue. N’en reste pas moins que les dialogues et réparties – pimentées, n’ayons pas peur des mots – sont parmi les plus savoureuses qu’il m’ait été de lire ces derniers mois.

    Attachante et irascible, Maeve évolue au côté d’un groupe de proches amis qui se trouvent finalement relégués au second plan, à cause du charisme émanant de la "petite" demoiselle qui leur fait de l’ombre. Les méchants parviennent quant à eux à se faire détester, et l’entourage de Maeve officie comme faire-valoir de choix.

    L’intimité toute en paradoxe qui s’ébauche entre Lukas et Maeve se développe dans le contexte plus vaste d’une histoire de vengeance. Les scènes d’actions sont bien amenées et une sensualité discrète assure le minimum sans tomber dans une extravagance qui n’aurait pas eu sa place ici. Si elle fait preuve de frivolité lors des premières pages, l’héroïne montre qu’elle vaut bien plus que cela. Elle ne se départira jamais d’une farouche indépendance et d’une combativité qui la rendent psychologiquement complexe. La série Maeve Regan affirme un grand potentiel, mais aussi une indéniable noirceur. L’univers de l’auteure s’inscrit dans une culture populaire qui transpire à travers l’aventure et certaines des situations auxquelles va se retrouver confrontée la jeune femme.

    De par ses qualités d’écriture et la formidable aura que dégage le roman au fil des pages, Rage de dents est une vraie bonne surprise. Dans sa globalité, le roman pourrait être perçu comme classique. Il parvient néanmoins à tirer son épingle du jeu grâce à son héroïne et au sens du détail dont le récit a fait l’objet. La suite promet beaucoup de révélations ainsi qu’un âpre combat, bataille que Maeve devra livrer contre les menaces esquissées dans ce premier tome.

    Vous êtes accros à la bit-lit et vous n’avez toujours pas lu Maeve Regan ? Ne perdez plus une seconde et ruez-vous sur le livre. Car il serait dommage de passer à côté d’une des premières dignes œuvres francophone de ce genre. Un roman de fort belle facture, dotée d’une couverture stylée au possible, reflet de l’histoire qu’elle illustre. Cette nouveauté ne dépareillera pas sur les étagères en compagnie des séries Anglo-Saxons. Une suite attendue, une auteure à suivre…

  2. Spooky dit :

    En effet ce roman, et son auteure, apportent un nouveau souffle au genre, que ma foi je n’apprécie guère en général. L’écriture vive, la personnalité forte de Maeve et le détournement d’une bonne partie des codes de la bit-lit permettent de passer par-dessus une entame un peu lente. A suivre, forcément.

    Plus de précisions ici : http://www.an-sible.com/article-maeve-regan-tome-1-rage-de-dents-105811988.html

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