Collectif. Contes de vampires

Ce volume de la collection Etonnants classiques regroupe quatre textes plus ou moins connus du genre vampirique.

Il y a d’abord Le Vampire, œuvre de John William Polidori, datée de 1817 (traduit en 1820 par Charles Nodier). Dans ce récit, Aubrey, un jeune héritier désireux de voyager, décide de suivre un homme au charme particulier, Lord Ruthven, à travers l’Europe, et ce malgré la mauvaise impression de ses tuteurs. Mais à son contact, il découvre peu à peu quel sombre personnage se cache derrière son compagnon de route, et finit par le laisser continuer son périple seul. Mais sa route va encore croiser celle de l’étrange personnage…

Le style un peu précieux de Polidori peut paraître un peu daté, mais la personnalité de Lord Ruthven est tellement marquante qu’elle restera dans l’esprit du lecteur longtemps après la fin de la lecture.

La Morte amoureuse, écrit par Théophile Gautier, est un autre récit fondateur du fantastique, avec l’histoire de ce jeune homme à peine sorti du séminaire, qui tombe sous le charme d’une intrigante courtisane au cours d’une réception mondaine. Il la perd de vue, mais plusieurs mois plus tard, ayant reçu une paroisse à administrer, il est appelé au chevet d’une femme sur le point de rendre l’âme, et découvre qu’il s’agit de Clarimonde, cette énigmatique femme à la peau pâle et à la peau froide. Ne pouvant réfréner une pulsion, il l’embrasse, ce qui la réveille.Clarimonde lui déclare alors qu’ils sont désormais fiancés. S’ensuit une histoire de passion incontrôlée, qui transforme Romuald en un dandy avide de débauche nocturne, et dont il se réveille chaque matin pour retrouver sa défroque d’homme d’Eglise.

Un récit qui parle donc d’ivresse, de folie, de passion, où la dimension vampirique est assurée par Clarimonde, qui soutire le sang dont elle a besoin pour survivre à celui qu’elle aime (car oui, elle semble vraiment amoureuse, comme le précise le titre) à l’aide d’une seringue.

Le troisième conte est le fait de l’italien Luigi Capuana, qui a donc écrit Le mari vampire en 1907 (traduit ailleurs sous le titre Un vampire), dont l’essentiel de l’intrigue est assurée par un dialogue entre Lelio Giorgi, jeune marié, qui raconte à son ami le scientifique Mongeri, les tourments desquels son couple est prisonnier depuis quelques temps. En effet ils sont harcelés par ce qui semble être l’esprit du premier mari (décédé) de son épouse. Cris, meubles qui bougent, une colère provoquée par la croyance qu’elle aurait provoqué son décès. Le bébé du couple, dans son berceau, reçoit également les assauts de l’esprit… D’abord sceptique, puis troublé par le désespoir de son ami, Mongeri finit par se rendre sur les lieux.

Ce texte est le moins connu des trois, mais aussi (et peut-être est-ce une explication) le moins réussi. En effet une bonne partie de celui-ci se résume à un dialogue entre les deux amis, le récit du harcèlement étant entrecoupé de considérations philosophiques de Mongeri, la plupart du temps déplacées dans le contexte. L’intérêt réside plutôt dans le vampire lui-même, totalement intangible et invisible, hormis par Luisa, son ex-femme. Mais pour Lelio, cela ressemblait plutôt à un poltergeist, jusqu’à ce qu’il puisse prendre corps, d’une façon vraiment inattendue que ne renierait pas William Friedkin… La dernière partie de la nouvelle, plus axée sur l’action, est d’ailleurs plus fluide en termes de narration.

Le récit est aussi à lire à la lumière des découvertes récentes de la psychanalyse, qui tendraient à expliquer des évènements surnaturels par un dérangement psychique. Or Capuana affirme l’inefficacité de telles conclusions face à un évènement réellement inexplicable, scientifiquement parlant, concluant son récit en montrant la mauvaise foi des chantres de ce genre d’explication, un humour bienvenu qui est également distillé au long du conte.

Comme dans la plupart des opus de la collection Etonnants classiques, celui-ci propose de nombreux bonus, permettant aux collégiens et lycéens de bien saisir la signification et la portée du thème vampirique, ou du moins d’acquérir quelques bases. Ainsi une rapide présentation du thème est faite par Stéphane Després, professeur de Lettres, des origines à l’archétype, retraçant rapidement l’essor littéraire du genre au XIXème siècle et passant en revue les différentes formes de vampires, du romantique au sentimental.

Au milieu du volume se trouve un dossier iconographique, avec des représentations des vampires « historiques » (Vlad Tepes, Erszebet Bathory…), puis diverses représentations artistiques (peintures, gravures, cinéma, séries TV). Pour boucler l’ensemble un parcours de lecture permet de revenir sur les trois contes, avant que des extraits de plusieurs textes illustrent la figure amoureuse (au sens large) chez le vampire, avec des extraits de Dracula, Carmilla, et à nouveau la Morte amoureuse.

Pour conclure, ce recueil permet une approche assez intéressante de la figure vampirique, avec trois textes plus ou moins pionniers. Les bonus permettent d’augmenter la culture scolaire sur le sujet.

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