Théâtre Royal de Toone. Dracula

Théâtre Royal de Toone. Dracula

L’interieur de la salle. Eric Danhier

Niché dans un grenier de la vieille ville, au-dessus d’un estaminet, dans une maison de 1696, se tiennent depuis 1830 les représentations du Théâtre Royal de Toone (prononcez Taune), une institution populaire de la vie bruxelloise. Et pour Halloween, Toone a exhumé de son patrimoine fantastique, Dracula de Bram Stoker (prononcez Stokèrr avec l’accent). C’est donc assis sur des petits coussins cloués à des bancs et sous des centaines de marionnettes pendues au plafond qui attendent leur spectacle pour retrouver les feux de la rampe que les visiteurs (re)découvrent ce classique de la littérature du XIXeme, Dracula.

En résumé : Jonathan Harker est envoyé en Transylvanie chez un mystérieux comte roumain qui fait l’acquisition d’un hôtel particulier place De Brouckère dans le centre de Bruxelles et l’oblige à rester un mois pour lui apprendre le Brusseleir, langue typique de la capitale belge.  S’en suit l’arrivée rocambolesque du Comte en Belgique et la chasse aux vampires bien connue du roman de Bram Stoker.

Théâtre Royal de Toone. Dracula

Dracula et Jonathan Harker

La pièce suit bien le roman tout en effectuant quelques clins d’oeil au film de Coppola ainsi que de nombreuses transpositions pour ancrer le récit en Belgique. La maison de Lucy Westerna se trouve à Knokke-Le-Zoute, station balnéaire mondaine très fréquentée, on attire les vampires avec un bloempanch, sorte de boudin noir, on soulage les maux de cœurs de Seward et Morris avec de la gueuze et bien sûr Harker ne part pas en voyage d’affaire sans ses tartines et son thermos !

Mi hommage, mi parodique, Le Dracula de Toone est un exemple de ce que les bruxellois appellent la zwanze, cet humour typique de la capitale belge. Si un habitant des Marolles vous dit une énormité avec le plus grand sérieux, c’est que vous vous faites sûrement swanzer.

Le théâtre tout entier participe à cette ambiance décalée et particulière. Les marionnettes, appelées poechenelles, sont en bois et très peu articulées, ce qui accentue le côté parodique du spectacle et traditionnellement, toutes les voix sont faites par une seule personne. Imaginez la voix rauque de Toone 8 (le titre de Toone se transmet d’un marionnettiste à l’autre) tentant d’imiter l’élocution haut perchée de Lucy ou Mina !

La dimension parodique est ancrée dans ce type de théâtre depuis le XiXeme siècle. Une tradition séculaire de marionnette existe à Bruxelles bien avant 1830. Mais à l’époque, les milieux modestes n’avaient pas l’opportunité d’aller voir les grandes pièces de théâtre ou les opéras. Ceux-ci étaient donc rejoués, adaptés grâce à des marionnettes à destination d’un public plus pauvre mais avec une très grande liberté de ton.

Théâtre Royal de Toone. Dracula

Le musée Eric Danhier

Le Théâtre Toone se veut l’héritier de cette culture populaire qui rejoue des grands classiques (les trois mousquetaires par exemple) ou des récits et légendes locales et veut perpétuer la tradition.

Dracula est une pièce en 2 actes (et beaucoup de tableaux) entrecoupée d’un entracte qui vous permettra de visiter le musée de la marionnette où les poechenelles sont mis à la retraite et de déguster une très bonne gueuze.

Toone apporte une nouvelle fois la preuve de la force du roman de Stoker et la perméabilité du mythe avec toutes les cultures.

Et n’ayez pas peur presque tout est compréhensible pour un français.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *