Dorémieux, Alain. Black Velvet

Anna vit seule, dans un appartement d’une banlieue en décrépitude, depuis le décès de son père et l’internement de sa mère. Un soir, alors qu’elle rentre chez elle, une force mystérieuse la pousse à pénétrer une sombre ruelle, au fond de laquelle elle découvre une étrange créature, qu’elle ramène chez elle. À partir de là, l’obsession qu’elle va ressentir pour cette étrange entité, dont elle suit de près l’évolution, prend le dessus sur le reste. Alors que pour le lecteur, les origines des perturbations de l’héroïne se dévoilent, Anna va peu à peu comprendre de quoi a besoin l’entité pour survivre.

Directeur de la revue Fiction, traducteur, anthologiste des « Territoires de l’Inquiétude » (dont le 4e opus est totalement consacré aux vampires), Alain Dorémieux était également nouvelliste, seul ou à plusieurs mains (au rang desquelles ont compte celle d’André Ruellan et de Gérard Klein, excusez du peu !). Black Velvet est pour autant son seul roman. Dorémieux ne choisit pas la facilité avec cette histoire qui conduit Anna et le lecteur à mi-chemin entre le rêve, la folie et le fantastique, dans un entrelacement maîtrisé mais qui met indubitablement mal à l’aise, et rappelle fortement le Possession de Zulawksi (d’ailleurs cité durant le récit, dans la bouche même d’un des protagonistes).

L’ombre de l’inceste et de la pédophilie plane sans équivoque sur le texte, les relations entre l’héroïne et son père constituant l’un des éléments moteurs du récit, et de la psyché d’Anna, notamment dans sa relation avec les hommes. Le style de l’auteur est particulièrement incisif, les phrases courtes mais leur rythme rapide (tout particulièrement dans les monologues écrits d’Anne, qui voient cette dernière sombrer plus ou mois… dans la folie ou autre chose ?).

Si le mot « vampire » n’est pas cité dans le roman, ce dernier utilise de nombreux codes du récit de vampire. La créature que recueille Anna semble ainsi se nourrir exclusivement de sang, que ce soit directement celui de cette dernière ou de tiers. Pour cela, la créature plante ses canines dans les veines d’Anna, s’abreuvant directement à cette dernière, au risque de la laisser exsangue. Le sang est ainsi un élément central dans le récit, notamment quand il s’agit de convoquer la relation incestueuse entre Anna et son père (via le thème de la perte de virginité, du sang menstruel…), puis entre Anna et ses amants, qu’elle entraîne dans des relations violentes où l’effusion de sang intervient, à un moment ou un autre.

Un livre qui exploite de manière assez originale le thème du vampire, au travers des différentes lectures possibles du roman (dont le vampirisme dont s’est rendu coupable le père en faisant de sa fille une victime de ses perversions sexuelles incontrôlables, matérialisation d’un amour paternel déviant). Par contre, difficile de dire que la lecture est légère, tant le malaise qui découle de ce texte finit par laisser un goût amer dans la bouche.

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