Durant le Moyen Âge, alors que la peste fait rage en Europe, le comte Albert chevauche seul avec Marcus, son conseiller. Séparé lors d’un accident, le noble ne parvient à retrouver son compagnon qu’au moment où celui-ci se fait vider de son sang. S’il se dissimule afin de ne pas subir le même sort, Albert comprend que celui qui a attaqué son homme lige fait partie d’un groupe qui ne vit que la nuit tombée. Il décide alors de les débusquer et mettre un terme à leurs exactions. En apparence, tout du moins.
David Muñoz n’en est pas à son premier album autour de la figure du buveur de sang. On avait pu le découvrir avec Le Manoir des Murmures, magnifiquement dessiné par Tirso, puis avec une autre trilogie, Terre des Vampires, cette fois-ci secondé par Manuel Garcia. S’il a depuis officié dans des genres un peu différents (la série Les Traqueurs), il retourne donc aux vampires avec ce one shot situé en plein Moyen Âge Espagnol. L’histoire plonge en effet le lecteur dans les âges sombres, et confronte un noble dont la femme a été emportée par la Peste à l’hypothèse d’une vie éternelle. Pour autant, si le récit s’ouvre sur la personne du comte Albert, ce n’est pas lui qui est au centre de l’album, mais bien le jeune Carlos. Envoyé sur les routes pour combattre les bandits par son père qui refuse son oisiveté, le destin du jeune homme sera à jamais bouleversé.
Le fond est intéressant, mais le développement est beaucoup trop linéaire, chaque rebondissement étant attendu (les raisons de l’intérêt du comte Albert pour les vampires, mais pas uniquement). Les personnages peinent également à convaincre, nantis d’une psychologie par trop sommaire. Surprenant, étant donné l’intérêt qu’on avait pu avoir pour les séries précitées écrites par le scénariste. À trop vouloir clore son histoire en un seul tome, aurait-il trop élagué dans sa trame originale ? Ou de s’être restreint pour atteindre la fin sans détour. Difficile à dire, mais le résultat est bien là : le récit s’oublie vite et ne marquera pas les esprits, sans être fondamentalement mauvais. La structure narrative à recours à plusieurs techniques pour approfondir l’ensemble, que ce soit le changement de point de vue, ou de multiples flash-back, mais la sauce ne prend pas.
En ce qui concerne le dessin, Rafael Vargas utilise un noir et blanc légèrement tramé qui rompt avec le style des dessinateurs avec qui on voyait jusque-là s’associer Muñoz. Le trait est assez fin, même si manquant d’homogénéité. Pour autant, le résultat est propre, l’auteur semblant maîtriser au mieux les décors dans lesquels il fait évoluer les personnages imaginés par son binôme. Le découpage est relativement traditionnel, mais l’illustrateur a aussi recours à des cases en pleine page, où un montage de ces dernières qui casse le classicisme de l’ensemble.
La mise en scène des vampires est ici relativement classique. Il s’agit de créatures qui craignent la lumière du soleil, et doivent se nourrir de sang pour survivre. Pour autant, le groupe que rejoint Carlos veille à rester discret, en ne s’attaquant qu’aux indigents et malades, quitte à parfois subir les affres de la famine. La victime du vampire, si ce dernier n’absorbe pas la totalité de son sang, est en mesure de se transformer à son tour, mais le nombre d’élus est relativement faible. Enfin, les buveurs de sang sont dotés d’une force physique surhumaine, même si on peut les tuer en leur enfonçant un pieu en plein cœur.
J’attendais avec impatience cet album, après avoir apprécié les travaux précédents du scénariste. Pour le coup, je suis relativement déçu du résultat, car l’approche est ici beaucoup trop classique et téléphonée.