Breccia, Alberto. Dracula, Dracul, Vlad ? Bah…

Breccia choisit, au tour de 5 histoires mettant en scène le comte Vampire, de donner une version décalée du mythe. Grotesque, joyeux, triste ou délirant, le Dracula de Breccia est ici utilisé en tant que métaphore du totalitarisme, le but de Breccia étant de mettre l’accent sur les exactions de la junte militaire alors au pouvoir en Argentine. Dracula rode, cours après une victime, se fait ratatiner par un superman de pacotille, a des soucis de dents, etc. Et Dracula se rend surtout peu à peu compte que le tyran sanguinaire qu’il est est bien peu de chose face à la violence du monde qui l’entoure.

Un album original mettant en scène Dracula, car pour un des rares ouvrages que j’ai pu lire jusqu’alors, le personnage est utilisé plus pour ce qu’il représente que pour ce qu’il est réellement. Métaphore de la violence, des tyrans qui s’abreuve du sang du peuple, mais aussi mise en scène de l’escalade de violence dans laquelle sont enfermé les dictatures, Dracula prenant peu à peu conscience que la monstruosité du monde est supérieure à la sienne. Ces cinq histoire sans dialogue nous propulse donc dans un monde cruel où même la plis innocente des donzelles peu se révéler une créature avide.

Le personnage du vampire tel qu’abordé ici possède les caractéristiques habituelles du buveur de sang. On se trouve donc en présence du classique suceur de sang qui vit la nuit, peu se transformer en chauve souris et repose la journée dans un cercueil perdu dans les cryptes de son château. Du Dracula de Stoker, le personnage de Breccia conserve la cape, les crocs et la prestance, même s’il est ici très souvent tourné à la dérision. Le sang, fluide vital indissociable du personnage, est toujours au cœur du récit, mais plus pour symboliser le sang du peuple, et donc dénoncer le régime.

Le dessin de Breccia est unique en son genre. Plus habitué du noir et blanc, il choisit néanmoins la couleur directe pour cet album, celle-ci venant en renfort de son trait rond et souple, à la limite du caricatural. Au final si le style graphique est très éloigné de ce à quoi on est habitué, il n’en demeure pas moins que cet album se lit d’une traite.

Un album très différent de la production vampirique habituelle, mais c’est aussi ce qui fait son intérêt. Une très bonne utilisation du mythe à des fins politiques.

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