Ours erre dans la nuit, cherchant à comprendre qui il est. C’est là qu’il fait la rencontre de Françoise, une chauve-souris qui reconnaît vite en lui un pair, une créature nocturne. C’est elle qui apprend à la peluche qu’il est un vampire, un êtreréature qui se nourrit du sang d’autrui. Alors qu’ils font tous les deux route en direction de la demeure de Françoise, ils sauvent de la noyade Célassié, une gousse d’ail ailé jugée inapte par les siens. Le trio finit donc chez Françoise, à écouter cette dernière lire le Dracula de Bram Stoker. C’est là qu’Ours à une révélation : il a été mordu par Dracula en personne, ce qui fait de lui Draculours ! S’impose dès lors à lui le besoin de rencontrer son célèbre géniteur vampire.
Bérangère Delaporte est une illustratrice jeunesse dont les premières productions remontent à 2009. Sa première BD solo, Grande Echappée (une adaptation d’un poème de Rainer Maria Rilke), est quant à lui sorti en 2023. Avec Draculours, l’autrice poursuit dans une veine littéraire tout en concrétisant un album qu’elle porte depuis longtemps : son projet de fin d’études. Reste que Draculours, s’il regorge de références (et pas qu’aux vampires) n’est pas une adaptation de Dracula : il s’agit bien d’une œuvre originale qui joue avec la figure du vampire avec une orientation jeunesse. Un peu comme avait pu le faire Chaque Jour Dracula de Loïc Clément et Clément Lefèvre.
Draculours est un album où le personnage-titre est en quête de son identité. Cette quête débute par la rencontre de Françoise et Célassié, qu’il va rapidement considérer en amis, sur lesquels il estime pouvoir compter. En tant que jouet et vampire, Draculours a néanmoins besoin de comprendre ce qu’il est. Il ne se reconnaît plus dans le monde des jouets, aussi voit-il dans sa part vampirique un socle sur lequel bâtir sa propre réalité. Mais un jouet peut-il prétendre à être accepté par Dracula comme sa propre descendance ?
L’histoire proposée par Bérangère Delaporte est légère, mais le fond est intéressant. L’autrice s’amuse des codes de la figure du vampire et de ses références, de Dracula au Bal des Vampires en passant par Le Dernier Voyage du Demeter. Ça et là, des touches d’humour bien senties se mélangent à la quête initiatique de Draculours. Mais l’histoire n’est pas pour autant toute rose, et réserve quelques moments cruels à ses protagonistes. Jusqu’à la révélation finale, qui permettra au personnage de trouver sa place bien à lui.
Graphiquement, l’album joue sur les deux versants de ce qu’est Draculours, tout en faisant appel à un coup de crayon jeunesse. L’autrice-illustratrice alterne en effet les scènes de nuit, plus sombres, et des scènes beaucoup plus lumineuses. La manière de dessiner les personnages évolue au fil des cases, épousant les différentes phases que rencontrent Draculours dans sa quête identitaire. A l’imagine de la couverture qui montre ce dernier en pleine affirmation de sa part vampirique.
Draculours est présenté comme ayant été engendré par Dracula (du moins le personnage en est-il persuadé). L’ours-jouet possède ainsi certaines caractéristiques vampiriques : il a deux canines acérées, n’a pas de reflet et doit dormir régulièrement dans un peu de sa terre natale… qui prend la forme d’un rouleau usagé de papier bulle. Sa part jouet lui permet néanmoins de s’affranchir de certaines faiblesses des créatures de la nuit. Quant à sa morsure…
Un album jeunesse inattendu qui joue avec la figure du vampire tout en matérialisant la quête d’identité d’un personnage partagé entre deux mondes.