Burton, Tim. Dark Shadows. 2012

A la suite du suicide de celle qu’il aimait, Barnabas Collins est transformé en vampire par Angélique Bouchard, une jeune femme éprise de lui qu’il a eu le malheur d’éconduire. Car Angélique est une sorcière, et sa vengeance n’aura de cesse de détruire la famille Collins de générations en générations. Accusé d’être un monstre, Barnabas est ainsi enterré au coeur de la forêt. 200 ans plus tard, pendant les années 70, il est accidentellement libéré…

L’adaptation cinéma de la série de Dan Curtis aura été une de mes plus grosses déceptions cinéma de ce début d’année 2012. Car l’attente a été longue avant de voir le film sur grand écran, une attente que j’ai fini par combler en me plongeant dans la série d’origine, objet d’un véritable culte aux Etats-Unis. Malheureusement, qu’on la regarde à travers le prisme de l’adaptation ou celui d’une oeuvre originale, le film de Tim Burton ne fait que reproduire une recette qui, au moins dans mon cas, ne prend plus.

Car si Burton ne s’en sort pas trop mal pour parsemer son film de quelques bonnes trouvailles visuelles (la sorcière – poupée de porcelaine, les nombreux parallèles entre Barnabas et le Nosferatu campé par Max Schreck), celles-ci ne parviennent pas à combler les défaillances d’un scénario complètement inexistant. Sans compter la présence de personnages inutiles (ou mal utilisés), ainsi que l’utilisation de twist qui tombent comme un cheveu au milieu de la soupe (l’apparition du loup-garou, le départ du père…).

A mon sens, tout ça contribue à donner l’image d’un Tim Burton qui surfe sur ses oeuvres passées, se bornant à reproduire des codes qui commencent sérieusement à avoir besoin de dépoussiérage (voire de renouvellement), sans chercher à les appuyer sur une histoire digne de ce nom. Alors certes, Burton n’est pas scénariste, mais j’ai du mal à croire qu’il n’ait pas validé le script avant de lancer son premier tour de bobine. De quoi également faire peur pour l’adaptation d’Abraham Lincoln : chasseur de vampire, signée du même Seth Grahame-Smith (déjà auteur du roman).

Les amateurs de la série trouveront peut-être appréciable les nombreux clins d’oeils disséminés à travers le film (la scène dans le bar, lieu incontournable du show de Dan Curtis, la scène de fin dans le manoir, qui fait écho à un des arcs pré-Barnabas de la série). Et il est amusant de retrouver Christopher Lee dans un film de ce genre. Mais des hommages à tout va ne permettent pas à eux seuls de donner de la consistance à un film.

La touche d’humour, qui me faisait initialement peur (étant donné que les bandes annonces en usaient à outrance) est à côté de la plaque, étant donné qu’on se borne à reprendre des clichés déjà usé par la corde par d’autres films qui jouaient déjà sur le décalage temporel (la télévision, les voitures, etc.). Seule éclaircie à ce niveau, l’arrivée du vampire en ville, jolie reconstitution de l’époque dans les moindres détails (jusqu’à la présence de Deliverance à l’affiche du cinéma de la ville).

Concernant l’aspect vampirique, Depp campe donc une créature qui n’a plus grand chose à voir avec le personnage de Jonathan Fryd dans la série d’origine. Son Barnabas Collins est esthétiquement bien plus proche du Nosferatu de Murnau, depuis ses long doigts griffus, en passant par sa blancheur cadavérique et ses mouvements esthétisés. Une créature qui est incapable de se mouvoir en plein jour, et qui redoute le contact avec l’argent. Sans oublier le besoin de boire régulièrement du sang humain, seul nourriture que son corps accepte désormais.

J’adore le Burton de Edward aux mains d’argent, celui de Batman et de Big Fish. A côtés de ces oeuvres, Dark Shadows fait vraiment pâle figure. Burton s’auto-citant (l’introduction a de furieuses similitudes avec celle de Sweeney Tod), utilisant jusqu’à les user les codes de son cinéma sans parvenir à donner de la profondeur à un scénario qui retire toute substance au matériau d’origine. En bref, une vrai déception, malgré quelques idées mal exploitées (le personnage de la sorcière, celui de la mère de famille, jouée par une Michèle Pfeiffer qui aurait mérité un rôle plus étoffé, etc.).

Burton, Tim. Dark Shadows. 2012Burton, Tim. Dark Shadows. 2012Burton, Tim. Dark Shadows. 2012

2 réponses à Burton, Tim. Dark Shadows. 2012

  1. Ewelf dit :

    Refusant de lire les chroniques avant de voir le film, maintenant que c’est chose faite, force est de constater que je suis d’accord avec ce que Vladkeran a écrit.
    Je pensais aller voir un « Tim Burton », un film un brin décallé, déjanté, une photographie a coupé le souffle, des personnages exuberants, etc. Et non, on a bien toujours ces plans et cet univers soignés mais le reste ne suis pas. Des personnages sans intérêt, des évènements qui n’amènent rien… un grand vide de 1h52 ! Seule la scène d’introduction sur les origines de la famille Collins et la malédiction de Barnabas vaut son pesant d’or. Le reste m’a déçue énormément. L’attente a été aussi forte que la décente aux enfers lors du visionage.

  2. Philippe Roy dit :

    Reste l’esthétique Burton, la seule véritable raison qu’ont ses fans de se déplacer. Le film ne m’a pas déçu, puisqu’il y a longtemps que je n’attends plus d´histoires de ce cinéma. Des images, des images splendides, voilà tout. Voilà ce que j’attendais, voilà ce que j’ai eu, j’étais satisfait. Voilà.

    Il est vrai, je ne connaît pas l’original. Burton a le chic pour massacrer ses références. Pensons à Batman, tuant Joker en lui tirant dans le dos à sa première rencontre. Ou Sleepy Hollow, où Ichabob Crane, de petit maître d’école désargenté dans le conte original, devient un pionnier de l’enquête scientifique, et fils de sorcière…

    Reste que la vacuité dérange. Notre Barnabas retrouve son amour réincarné, que les forces du destin ont déplacé pour les réunir. Il la verra trois fois en tout, une fois au repas, une fois sur la balcon et la dernière fois à la fin. Entre temps, Barnabas amoureux arrive à se taper la psychiatre et la sorcière, son ennemie jurée. L’histoire d’amour centrale n’est pas seulement écartée, elle est avilie, presque tournée en dérision.

    Le film est joli, et ça m’a suffit, mais c’est une grande pièce bien vide.

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