Macumi, Malaïka. Interview de l’auteur des anges de l’ombre

Bonjour Malaïka. Pour ceux qui ne te connaitraient pas, peux-tu te présenter et nous expliquer ce qui t’a mené ces derniers jours à la sortie de ton premier recueil de textes ?

Bonjour. J’ai 27 ans, je vis en Bretagne et je suis depuis toujours une fan inconditionnelle de littérature fantastique et d’histoires de vampires. Toute petite, je commençais déjà à inventer des récits mettant en scène des morts-vivants ainsi que d’autres créatures surnaturelles. J’ai toujours été fascinée par ce genre d’univers. Mon recueil est donc la cristallisation de cette passion ; il fallait que je partage mes histoires, qu’elles sortent enfin de mes tiroirs, et les éditions du Petit Caveau ont pu me donner cette chance. Mes Anges de l’Ombre sont ainsi passés des ténèbres à la lumière…

Quels sont les auteurs qui t’ont le plus inspirée ?

Les auteurs fantastiques du XIXe siècle m’ont particulièrement inspirée ; je pense par exemple à Bram Stoker, Sheridan Le Fanu, mais aussi à Maupassant et à Alexandre Dumas (avec les Mille et un fantômes). J’aime leur subtilité, la façon dont ils distillent un fantastique suranné mais diablement efficace. Et puis, il y a aussi, plus proches de nous, Anne Rice et Stephen King qui m’ont impressionnée par leur style, leurs atmosphères faites respectivement de sensualité troublante et d’horreur à l’état pur.

Comment parviens-tu à t’attaquer aussi souvent au mythe du vampire sans te répéter, sans partir sur les mêmes bases ?

En écrivant ce recueil, j’avais déjà en tête différentes facettes du mythe du vampire : le légendaire Vlad Tepes, le vampire romantique et désespérément solitaire, avide de rédemption, le vampire qui apporte le malheur autour de lui, et la folie qui est pour moi un aspect presque indissociable au mythe (la démence de celui qui se sait immortel ou de celui qui s’imagine être une créature de la nuit). Pour chacune de ces facettes, j’ai aussi essayé d’adopter un style différent, soit en accord avec le thème, soit en accord avec la personnalité du personnage principal, prenant parfois des libertés avec la narration linéaire, mélangeant les points de vue et les genres… Je pense que c’est aussi cette diversité de styles et de thèmes qui empêche la redondance…

Comment travailles-tu à l’écriture de tes nouvelles ? Passes-tu beaucoup de temps à les remanier avant de décider qu’elles sont publiables ?

Ça dépend des nouvelles. Certaines peuvent me prendre beaucoup de temps (plusieurs mois), d’autres sont rédigées plus rapidement. La plupart des nouvelles du recueil ont été écrites lorsque j’étais encore étudiante ; j’avais alors du temps à leur consacrer. Aujourd’hui, avec mon métier d’enseignante, c’est plus difficile de trouver un moment pour m’évader afin de les concevoir comme il se doit et de les écrire. De manière générale, je remanie beaucoup mes textes car je suis rarement satisfaite du résultat. Je peux par exemple passer plusieurs jours sur un seul paragraphe pour décider ensuite de le supprimer… Tant que je n’arrive pas à avoir ce que je veux, la nouvelle reste dans mon tiroir…

Toi qui es tombée dans la marmite du vampire depuis de très nombreuses années, quelle est ton opinion sur le phénomène Twilight et la visibilité actuelle du mythe en littérature et au cinéma ?

Si je n’ai pas du tout accroché à la saga de Stephenie Meyer qui mutile l’aspect subversif propre aux vampires (en faisant d’eux des supers héros « végétariens »), je pense toutefois que cette nouvelle mode est une bonne chose dans la mesure où elle place le vampire sur le devant de la scène. Grâce à cet engouement, de nombreuses histoires de vampires sont publiées ; bien sûr, tous les ouvrages qui sortent ne sont pas tous de même qualité, il faut trier, mais c’est suffisant pour enrichir le mythe du vampire. Parmi la pléthore de morts-vivants romantiques que les rayons fantastiques nous proposent, quelques chefs d’œuvres peuvent se détacher du lot, tel le magnifique roman du suédois Jon Ajvide Lindqvist Laisse-moi entrer. Ces auteurs arrivent à tirer parti des différents aspects du mythe, en redonnant au vampire l’aspect subversif que Stephenie Meyer et ses émules n’avaient pas hésité à supprimer. Beaucoup de « puristes » dénigrent le phénomène bit-lit, soulignant son style plat et ses intrigues mièvres. Et c’est pourtant ça qui marche, en littérature du moins. Au XIXe siècle, le personnage du vampire s’est lui aussi développé dans les marges de la littérature avec, dans un premier temps, les romans frénétiques et le roman-feuilleton (Varney le Vampire, La Vampire de Paul Féval, La Baronne trépassée de Ponson du Terrail…). Ces genres littéraires n’étaient pas rangés parmi les plus « nobles » non plus… Quant au cinéma vampirique de ces dernières années, il me paraît plus riche et plus subtil, mises à part les adaptations de Twilight (je pense par exemple à Thirst, Morse…) et suscite une réflexion mêlée de fascination, chez le spectateur.

Quelles ont été tes premières et dernières rencontres avec un vampire (littéraire et/ou cinématographique) ?

Ma première rencontre avec un vampire littéraire remonte à très loin, quand j’avais à peu près une dizaine d’années. C’est à cette époque que j’ai découvert les aventures du Petit Vampire d’Angela Sommer-Bodenburg, publiées alors à la Bibliothèque Rose. Je trouvais le personnage du petit Rüdiger Von Dentkreuz fascinant et je garde d’excellents souvenirs de lecture. Au cinéma, c’est le Dracula de Coppola qui m’a causé une forte impression, avec son aspect grandiose et son atmosphère troublante. Il fait toujours partie de mes films cultes. Récemment, j’ai eu un coup de cœur pour la série True Blood d’Alan Ball, beaucoup plus intéressante que les romans de Charlaine Harris dont elle est tirée… Enfin une série où les vampires s’éclatent (dans tous les sens du terme) !

Pour toi, comment peut-on analyser le mythe du vampire? Qu’est ce qui en fait la pérennité ?

Je pense qu’on ne peut pas analyser le mythe du vampire sans tenir compte de la société, du contexte et de l’époque dans lesquels il évolue. Le vampire, c’est pour moi le miroir déformant de l’être humain, le miroir qui reflète les passions humaines, mais aussi les peurs et les tabous du moment. Il peut symboliser la peur de la femme ou de l’étranger, comme dans les récits du XIXe siècle (et en particulier le roman de Stoker) mais aussi l’homme parfait, sécurisant, doté d’une force surhumaine, avec une humanisation qui s’est faite progressivement jusqu’à Twilight. Aujourd’hui, le véritable monstre n’est donc plus le vampire qui se pare alors de toutes les plus hautes vertus (bonté et chasteté entre autres), mais l’être humain. Pour moi, c’est ses différentes évolutions qui en font sa pérennité. Il évolue en fonction de chaque siècle, de chaque société, et peut prendre ainsi de multiples formes. Il nous brandit toujours ce même miroir, au reflet fluctuant.

As-tu encore des projets de livres sur le thème ? Quelle va être ton actualité littéraire dans les semaines et les mois à venir ?

Eh bien, pour l’instant, je continue à écrire des nouvelles fantastiques que je proposerai pour des anthologies et des revues, et puis peut-être me lancerais-je dans la rédaction d’un roman vampirique… un travail de longue haleine qui serait pour moi un sacré défi ! Mais mon genre préféré reste la nouvelle pour sa concision et son efficacité. Écrire un autre recueil de nouvelles fantastiques me tenterait donc bien ! 🙂

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